L'urbanisme et la gouvernance du Système d'Information
Comment modéliser les niveaux (stratégique, tactique...) de l’Architecture d’Entreprise ?
Les différents niveaux d'architecture répondent à différents niveaux de préoccupations et ont des publics différents. Le cadre d'architecture et le référentiel doivent aider à garantir que ces architectures soient stratifiées et synchronisées, afin qu’elles forment une vision cohérente et équilibrée de l'ensemble de l'entreprise.
Les niveaux d'architecture selon TOGAF
(diagramme UML de package réalisé avec Modelio Open Source)
La dénomination des niveaux a été influencée par
“The Open Group Architecture Framework” (TOGAF).
Une entreprise a une structure complexe et généralement hiérarchique, et l'on doit créer des architectures à des niveaux discrets de cette structure. Cette hiérarchie d'architectures est analogue aux hiérarchies d'objectifs et de capacités, et s'aligne intuitivement sur les divisions au niveau stratégique, programme et projet. Dans une petite organisation, il est possible de créer une architecture unique qui couvre le niveau stratégique et les niveaux de projet ou de capacité, mais dans une grande entreprise, au moins trois niveaux distincts sont généralement nécessaires :
- Stratégique - Long terme, de l'ordre de 3 à 5 ans,
- Tactique - Moyen terme, de l'ordre de 1 à 2 ans,
- Solution - Court terme, de l'ordre de 6 à 12 mois.
Les architectures Stratégiques
Exemples d'Architectures Stratégique, Tactique et de Solutions
(diagramme UML de package réalisé avec Modelio Open Source)
Elles décrivent des plans et des initiatives stratégiques et s'exécutent généralement pendant des années. Les architectures stratégiques fournissent des plans à long terme, qui sont généralement des visions de l'avenir sur une période de trois à cinq ans.
La période peut être plus longue pour les industries ou les entreprises qui ne sont pas affectées par des environnements dynamiques et perturbateurs. Les architectures stratégiques doivent prendre en charge ou s'aligner sur les objectifs stratégiques de l'entreprise.
La technologie de modélisation stratégique dispose d'un certain nombre d'outils qui peuvent être utilisés, tels que le diagramme “Balanced Scorecard”, qui peut aider à identifier les objectifs liés à l’IT.
Diagramme "Balanced Scorecard" (diagramme réalisé avec Visual Paradigm)
Les architectures Tactiques
Exemples d'Architecture Tactique intégrant des architectures de solutions
(diagramme UML de package réalisé avec Modelio Open Source)
Elles décrivent des plans intermédiaires qui aident à partitionner les architectures de niveau Stratégique en groupes gérables.
Elles peuvent généralement durer un certain nombre d'années et représenter une feuille de route au niveau du portefeuille applicatif ou des étapes sur la manière d'atteindre les objectifs exprimés dans les architectures Stratégiques auxquelles ils se rapportent.
Elles agissent comme un cadre pour l'organisation au niveau des solutions et assurent que les capacités sont développées et qu'elles créent finalement de la valeur métier.
Les diagrammes de “Roadmap” peuvent être utilisés à tous les niveaux de l'architecture Tactique, y compris les Architectures d'Entreprise, d'Information, d'Application et de Technologie, montrant le séquencement temporel des actions au niveau d'un portefeuille applicatif ou d'un programme.
Exemple de diagramme de "Roadmap" (diagramme réalisé avec ADOIT:CE)
Les architectures de Solutions
Elles décrivent des projets spécifiques ou des activités au niveau des capacités qui peuvent généralement être réalisées en quelques mois, plutôt qu'en plusieurs années. D'un point de vue métier, elles se concentrent généralement sur un problème ou une opportunité particulière. De même, d'un point de vue technique, elles impliquent généralement une tranche des domaines de l'information, des applications et de la technologie, mais peuvent, dans certaines circonstances, nécessiter l'examen d'un certain nombre de ces domaines.
Les outils doivent aider au niveau de l'architecture de chaque Solution, de la définition des buts et objectifs métier et de leur mise en relation avec les composants d'Information et d'Application, et de Technologie qui sous-tendent les applications.
L'architecture Métier peut être définie et gérée à l'aide de profils UML (ensemble de stéréotypes, tagged values et contraintes OCL). Cela permet de créer des “Drivers” (représentations des conditions motivant une organisation métier à définir ses objectifs et à mettre en œuvre les changements nécessaires pour les atteindre), des buts et des objectifs, qui peuvent être démontrés aux parties prenantes à l'aide de diagrammes, de matrices et de documentation, publiés automatiquement à partir des modèles.
Des générateurs de schémas de RDBMS et de scripts SQL à partir de diagrammes de classes UML aident à travailler avec l'architecture de l'Information, et les éléments créés peuvent être liés à l'architecture métier.
Les services applicatifs, les applications et les interfaces peuvent être modélisés, et leurs relations entre eux et avec les éléments des architectures métiers et technologiques peuvent être définies et représentées par des liens de traçabilités entre des artefacts de modélisation appartenant même à des notations différentes, comme ArchiMate, BPMN, DMN, UML…
Les services technologiques, les nœuds et dispositifs technologiques peuvent être gérés et, le cas échéant, peuvent être dérivés du Modèle de référence technique.
Les outils doivent gérer les exigences architecturales, qui peuvent être liées aux éléments qui composent entreprise, processus métier, fonctions, applications, technologies et autres architectures spécifiques.
Un framework agile (Kanban, Scrum…) peut être utilisé pour gérer ces projets et garantir que la valeur métier est livrée en temps opportun.
Mais au fait, y a-t-il une norme pour représenter
les architectures Stratégiques et Tactiques ?
Vous n'en avez peut-être jamais entendu parler, mais cette norme existe et se nomme BMM (Business Motivation Model). Il s'agit d'un modèle de motivation métier qui fournit aux entreprises un ensemble de notations normalisé par l’OMG (Object Management Group), pour l'élaboration de plans métier. Il permet de modéliser ce que l'entreprise souhaite réaliser, comment y parvenir, les impacts potentiels, les ressources, etc.
Voir nos articles consacrés à la norme BMM de l'OMG à la fin, dans les compléments de lecture.
Exemple de diagramme BMM (diagramme réalisé avec Visual Paradigm)
Et l'apport d'ArchiMate ?
La stratégie et les éléments de motivation d'ArchiMate ont été inspirés en partie par BMM.
Bien qu'un mappage entre de nombreux éléments de motivation d'ArchiMate et les concepts BMM soit possible, BMM fournit une description plus détaillée de la motivation, tandis que le langage ArchiMate vise à couvrir un large champ et à interconnecter différents domaines.
Voir nos articles consacrés aux éléments de stratégie et de motivation d'ArchiMate à la fin, dans les compléments de lecture.
Diagramme ArchiMate de la couche Strategy, représentant les objectifs (Goals),
les résultats attendus (Outcomes) et les principes (Principles) (diagramme réalisé avec ADOIT:CE)
La traçabilité comme assurance de l'alignement stratégique
La traçabilité occupe une place transverse et traverse toutes les strates d’architecture.
Il existe plusieurs outils, dont la matrice des relations et les diagrammes de traçabilité, qui peuvent être utilisés pour montrer les relations entre les éléments des architectures d'entreprise, afin de s'assurer qu'ils contribuent tous de manière démontrable à la réalisation des objectifs stratégiques.
Matrice de Relations entre Exigences et Cas d’Utilisation et une vue de ces relations
(diagramme réalisé avec Enterprise Architect)
Le diagramme de Traçabilité fournit une vue hiérarchique des connexions d'éléments, permettant de visualiser et d'interroger la traçabilité au fur et à mesure qu'on accède aux éléments dans le modèle. Cet outil est particulièrement utile, car un modélisateur choisira souvent de masquer les relations du diagramme, mais en sélectionnant un élément dans le diagramme et en visualisant ses connexions dans la fenêtre Traçabilité, toutes ses relations seront révélées.
Exemple d'outil de traçabilité (diagramme réalisé avec Enterprise Architect)
Conclusion
Pour ne plus souffrir des modèles opérationnels, qui ont subi des changements progressifs et non structurés au fil du temps, devenant souvent des obstacles à la mise en œuvre de leur stratégie, les entreprises ne devraient plus commettre l'erreur d'appliquer leur stratégie de bas en haut (bottom-up), comme si, lors de la conception d’un bâtiment, on s’adressait en premier aux ingénieurs spécialisés dans les fondations.
Pour une entreprise, une approche de haut en bas (top-down) permet de se restructurer, de ne pas risquer de s'éloigner de la réalisation de ses objectifs à long terme, et de respecter l'alignement stratégique.
|
Rhona Maxwel @rhona_helena |
"Toute idée devient fausse au moment où l’on s’en contente."
Alain
Compléments de lecture
BMM (Business Motivation Model)
- BMM Business Motivation Model, norme OMG, les idées clés pour mieux comprendre la stratégie d'entreprise
- BMM Business Motivation Model, norme OMG, les éléments de modélisation – vision, but, objectif, stratégie, tactique, …
- Cours complet BMM Business Motivation Model norme OMG - les concepts de base – les moyens pour parvenir à ses fins
- Cours complet BMM Business Motivation Model norme OMG - les facteurs impactants et les évaluations de leurs influences
- Positionnement des processus et règles métiers dans la norme BMM Business Motivation Model de l’OMG et autres artefacts génériques
ArchiMate
- ArchiMate la synthèse : les éléments de motivation
- ArchiMate en condensé : les éléments de stratégie
Outils d'Architecture d'Entreprise
- Essai et évaluation de Modelio : est-il un bon outil de modélisation ?
- Visual Paradigm : l’eldorado du consultant en quête de présentations dorées, mais est-il un bon outil de modélisation pour l’architecte d’entreprise, voici notre test
- ADOIT:CE pour la gestion de l’Architecture d’Entreprise
- Archi (archimatetool) : essai et analyse de cet outil ArchiMate français gratuit sous Windows, Linux et Mac OS
- Le meilleur du meilleur des outils de modélisation de Systèmes d’Information pour 2017 : les « Modsars » de « urbanisation-si.com » récompensent les plus innovants
Architecture d'Entreprise augmentée, quelle influence de l’Intelligence Artificielle sur la gouvernance et la stratégie ?
L’omniprésence et la protéiformité de l’IA, comme le RPA (Robotic Process Automation) ou les chatbots, déclencheraient-elles une disruption et feraient-elles naître une Architecture d'Entreprise augmentée ? L’IA a-t-elle un rôle à jouer dans les décisions des comités de direction ?
Un ancêtre de l'IA, pour les cinéphiles
APIsation, plateformisation, données “chaudes”, données “froides”, données "tièdes"...
L’APIsation et la plateformisation de l’entreprise alliées à l’urbanisation du SI participent à l’intégration de l’IA dans les applications.
Les données “chaudes” représentent le référentiel des entités métier, les indicateurs de pilotage et sont persistantes dans des bases SQL avec un accès en quasi temps réel. Les données “froides” sont le résultat de l’archivage dans d’autres espaces de stockage, sans contrainte de temps de réponse. Entre les deux, les données "tièdes", issues du rapprochement des deux types précédents, offrant rapidité et quantité et appartiennent au domaine du Big Data qui alimente les algorithmes de l’IA.
L’Architecture Réactive, basée sur les évènements, les APIs et les microservices, fait partie des fondements pour déployer de l’IA.
Les cycles d’évolution des technologies étant de plus en plus courts, l’open source devient incontournable. De même l’open innovation permet d’innover en mettant en œuvre une collaboration entre les grandes entreprises et les start-ups avec les incubateurs, les hackathons, les financements…
L’externalisation des compétences techniques comprend des risques, notamment sur la maîtrise de la sécurité, des savoir-faire, mais aussi sur l’évaluation éthique. Intégrer une brique fournie et maintenue par un tiers dans la chaîne opérationnelle pose le souci de voir partir le savoir-faire métier, car en effet, même si les données appartiennent à l’entreprise, les algorithmes et les modèles appartiennent en général aux fournisseurs. Ils peuvent donc acquérir et consolider le savoir-faire métier de plusieurs entreprises clientes pour le vendre ensuite à des entreprises concurrentes ou l’exploiter eux-mêmes.
La dimension éthique pour les entreprises réside aussi en partie dans leur capacité à s'approprier le développement de solutions et à traiter le plus en amont possible les questions de traçabilité et d'explicabilité des algorithmes. La question d’acceptabilité des modèles est cruciale aujourd’hui. S’il est indispensable de faire appel à l’expertise extérieure (dynamique évolutive, sujets très pointus…), le contrôle est indispensable. Internaliser les outils d’IA demande des compétences, car il est rare de trouver un outil open source sur étagère qui réponde complètement aux besoins de l’entreprise. C’est en général une bonne base, mais elle doit être adaptée à chaque contexte. Il faut faire beaucoup d’assemblage et souvent un peu de développement, donc il faut avoir les compétences en propre.
Du Machine Learning dans la gestion de projet
L'analyse prédictive peut fournir des conseils au chef de projet pour atteindre le meilleur résultat possible, basé sur ce qui a fonctionné dans les projets antérieurs.
Les chatbots servent d'assistants de projet. Ils peuvent prendre en charge des tâches subalternes, telles que l'organisation des réunions, contrôler la performance en fonction des références de base, rappeler aux équipes projet les activités programmées.
La planification basée sur l'lA pourrait inclure les leçons apprises des projets antérieurs et suggérer plusieurs calendriers possibles, en fonction du contexte et des dépendances. Par ailleurs, les plans de projet pourraient être adaptés et recalibrés en quasi temps réel sur l'historique des performances de l'équipe et l'avancement du projet. Le système pourrait même alerter le chef de projet des risques et des opportunités, en utilisant l'analyse des données de projet en temps réel.
Dans son évolution, l'IA pourrait convertir les cartes mentales (mind map) créées par les équipes projet en ontologie métier, en tirer des tâches reliées entre elles et il ne resterait plus qu'un pas à faire pour arriver à des modèles BPMN.
La mise en œuvre de l'apprentissage automatique (Machine Learning) dans le management de projet permet l'analyse prédictive et corrective, visant à fournir au chef de projet des alternatives pour la prise de décision.
Le comité de direction augmenté, une utopie ?
Les dernières études en la matière mettent en évidence un usage de l’IA au niveau tactique, plutôt qu’au niveau stratégique de l’entreprise, c’est-à-dire essentiellement dans l’amélioration des processus opérationnels de l’entreprise.
Voir nos articles :
- Cours complet BMM Business Motivation Model norme OMG - les concepts de base – les moyens pour parvenir à ses fins
- ArchiMate la synthèse : les éléments de motivation - 2
- ArchiMate en condensé : les éléments de stratégie - 3
Les récents progrès pourraient laisser penser que de tels modèles pourraient trouver une application dans la prise de décision stratégique, voire prendre les décisions stratégiques elles-mêmes lorsqu’on les utilise dans un conseil d’administration.
La perspective qu’une IA puisse influer dans les décisions stratégiques appartient encore au monde de l’utopie. Comme tout un chacun, la compréhension des décideurs d’un problème, de son contexte et de sa résolution, s’appuie notamment sur leurs connaissances, leurs expériences et leurs énactions.
L’essence même de la prise de décision stratégique est définie par un manque d’informations, une incertitude élevée et une forte interdépendance avec les acteurs de la décision : autant de caractéristiques qui rendent assez improbable le fait de confier les décisions stratégiques d’une entreprise à une IA.
Les biais des DG seraient alors remplacés par les biais des jeux de données, qu’ils proviennent de biais cognitifs, du surapprentissage, d’échantillons, de sélection, de valeurs aberrantes ou surreprésentées.
Les disruptions tous domaines confondus impactant le décisionnel relèvent par nature même de l’imprévisibilité et sont inmodélisables. Aucun modèle prédictif n’a pu, ne serait-ce qu’entrevoir, l’ubérisation. Sûrement parce qu'ils sont basés sur des données qui ne sont plus de premières fraîcheurs, tombant rapidement dans l’obsolescence.
Les entreprises entamant leur transition numérique doivent composer des équipes aux triples compétences : métier, informatique et mathématiques, sous la direction d’un CDO (Chief Data Officer).
La gouvernance doit constamment faire de la prospective, afin de maintenir ses informations sur l’IA devenu domaine hautement stratégique. Le rôle de l’architecte d’entreprise peut être renforcé par celui d’un architecte des données (CDO Chief Data Officer) au service de la création de valeur et donc de l’IA. Il apparaît ainsi nécessaire que le CDO possède une solide culture en matière d’IA, afin d’éclairer les discussions de la gouvernance sur ce sujet stratégique.
Conclusion
En termes de recherche fondamentale, les avancées et les percées se succèdent, aboutissant peu à peu à des applications opérationnelles. La veille, la vision et la prospective stratégique sur ces sujets de recherches technologiques restent essentielles pour se préparer aux disruptions majeures à venir.
Nous avons déjà pris l’habitude d’utiliser notre smartphone comme "prothèse cognitive", et cette capacité ne va faire que s’étendre et sûrement aux instances décisionnelles des entreprises.
|
Rhona Maxwel @rhona_helena |
“Sur la route, il y avait déjà des bandes réfléchissantes, maintenant il y roule des voitures intelligentes.”
Marc Escayrol
Compléments de lecture
- Exemple de méthode d’Architecture d’Entreprise d’un grand cabinet de conseil : EAM Enterprise Architecture Management de McKinsey
- Le rôle de la prospective pour une entreprise innovante et résiliente
- Les meilleurs articles sur l’architecture d’entreprise, ses méthodes et ses outils, découvrez quels sont les articles les plus lus de notre blog
- Les règles d'urbanisme du SI : maîtriser les échanges inter-applications
- Mais dans la vrai vie, qu'est ce qu'il y a dans les règles d'urbanisme du Système d'Information ?
- Les règles de l'urbanisme du Système d'Information : encore une contrainte de technocrates ?
- Urbanisation du Système d'Information : créez l'évènement !
Le rôle de la prospective pour une entreprise innovante et résiliente
“Demain ne sera pas comme hier. Il sera nouveau et dépendra de nous. Il est moins à découvrir qu’à inventer” dixit Gaston Berger, l'inventeur du terme prospective. Pour renforcer ses capacités d’innovation, sa résilience et ses processus métier, l'entreprise doit non seulement surveiller le monde qui l’entoure, mais aussi mettre en œuvre des scénarios prospectifs contribuant à établir ses stratégies.
Démarche transversale en plein essor, la prospective offre une capacité d'analyse qui simule des avenirs possibles sur une question donnée et dans un champ spatio-temporel délimité.
Compte tenu de la mouvance d’un monde empli d’incertitudes, la survie d’une entreprise est étroitement liée à sa résilience. Il va s’agir de sa capacité à s’adapter rapidement aux événements néfastes, aux épreuves et aux échecs, tout en maintenant son activité économique, en protégeant son personnel et ses valeurs. Se remettre sur les rails après une situation difficile ne suffit pas, il faudra prendre de la hauteur, appréhender le contexte et lancer une démarche de prospective stratégique de manière à tourner l’entreprise vers l’avenir et à favoriser l’enclenchement d’une innovation de rupture nécessaire à son adaptation et à sa résilience.
De quoi parlons-nous exactement ?
Pour éviter toute confusion et pour la clarté de la suite de cet article, commençons par définir des concepts qui semblent similaires, mais en y regardant de plus près, qui présentent bien des différences tout en étant complémentaires.
L’anticipation
Terme générique, l’anticipation rassemble les méthodes de prédiction, de prévision et de prospective.
La prédiction
La prédiction concerne un futur déjà écrit en extrapolant des connaissances existantes. La méthode est une heuristique basée sur le fait qu’en première approximation le futur présentera des similitudes avec le passé. Par exemple, le Big Data et le Machine Learning permettent d’identifier des corrélations statistiques implicites dans les données, augmentant la somme de connaissances pouvant être extrapolées sur une période future.
La prévision
La prévision concerne les futurs probables, où les scénarios représentent des hypothèses implicites ou explicites sur lesquelles sont basées les projections obtenues par extrapolation et/ou interpolation mathématiques faisant explicitement intervenir la variable temps.
Prévoir un futur probable consiste alors à recueillir et à interpréter les résultats produits par le modèle en déplaçant la variable temps à une valeur située dans le futur.
Si certaines hypothèses se vérifient avec le temps, on aura des certitudes sur des événements à venir. On pourra alors adopter une posture déterministe en planifiant des actions pour s’y préparer.
La projection
Les projections sont des extrapolations de tendances d’un phénomène correspondant à des estimations quantitatives sur des périodes déterminées à venir. Différents outils existent comme l’analyse de séries chronologiques basée sur la modélisation des tendances passées tenant compte d’hypothèses.
Exemple de projections utilisant l'analyse de série chronologique (https://www.inspq.qc.ca/jasp/accueil)
On peut aussi utiliser la microsimulation qui a pour objectif de représenter un système dynamique composé d’entités possédant des propriétés soumises à des événements avec une certaine probabilité de modifier leurs valeurs.
La prospective
Se préparer à l'incertitude
Contrairement à la prévision, avec la prospective, on est dans une posture proactive, on se prépare à l’incertitude du futur en produisant des scénarios contrastés (disruptifs, de crises, de mutations, de solutions) pour le décisionnel, le management de l’innovation et le management stratégique.
La démarche prospective se situe en amont de la stratégie dont elle éclaire les choix en balayant un plus long terme, au moins 10 ans.
En stratégie d’entreprise, la démarche de prospective consiste à réaliser des diagnostics, à élaborer des scénarios nominaux ou alternatifs et à émettre des recommandations. Les étapes de planification des risques et de proposition de visions temporelles vont aider aux décisions stratégiques sur le long terme, réduire les incertitudes face à l’avenir et enfin légitimer les actions entreprises.
L’étude prospective peut être basée sur la veille consistant à identifier les données les plus seyantes sur les changements dans le monde, les mutations émergentes, les ruptures technologiques et l’ensemble des événements futurs pouvant potentiellement avoir des impacts importants.
André-Clément Decouflé, prospectiviste et auteur de nombreux ouvrages, parle de néologisme créé pour définir une méthode d’analyse des problèmes de décisions basée sur les discontinuités introduisant des ruptures de tendances plutôt que de se fonder sur les expériences passées, l’analogie ou l’extrapolation. Le processus de décision doit intégrer une multitude de contextes futurs pour pouvoir intégrer à moindres risques les incertitudes susceptibles d’impacter la pertinence de la solution retenue.
Le but de la prospective est de raconter des histoires sur les futurs possibles issus des répercussions des choix présents, autrement dit, d'anticiper de manière la plus efficiente qui soit les évolutions d’une organisation.
Concrètement, les scénarios prospectifs peuvent être rédigés textuellement ou être basés sur des méthodes formelles comme les matrices des impacts croisés ou la méthode DELPHI.
La matrice d'impacts croisés
La matrice d'impacts croisés modélise les influences directes entre des événements (éléments ou variables). Schématiquement, l’impact direct d’un événement ek sur un autre em est représenté par une flèche partant de ek et arrivant à em.
Exemple de graphe montrant les variables impactantes et impactées
Pour simplifier, le même poids (égal à l'unité) 1 est attribué à toutes les relations directes existantes ; l'absence de relation entre deux événements est symbolisée par le chiffre zéro. L'examen porte sur les combinaisons deux à deux de tous les événements retenus, il en résulte une matrice booléenne carrée M dont l'élément générique est :
- ekm = 1 si l'élément ek de la k-ième ligne a une influence directe sur l'élément em de la m-ième colonne.
- ekm = 0 si l'élément ek de la k-ième ligne n’a pas d’influence directe sur l'élément em de la m-ième colonne.
- ekk = 0 car ek ne peut s'influencer lui-même, directement.
En tenant compte des influences directes, la somme (Σekm ; m-1…) de la ligne k de la matrice M comptabilise le nombre de variables influencées directement par ek : est ainsi mesuré le pouvoir moteur (ou indice d'influence) de ek.
L'indice de dépendance de em se mesure par la somme (Σekm ; k=1…) de la colonne m. C'est le nombre de variables dont em subit directement l’influence.
Exemple de matrice des impacts croisés correspondant au graphe précédent
La méthode DELPHI
DELPHI est une méthode systématique qui a été reprise dans la méthode agile Scrum et rebaptisée “planning poker” pour réaliser les estimations des user stories.
La méthode consiste pour une problématique donnée à interroger un groupe d'experts lors de plusieurs tours. À chaque nouveau tour, le questionnaire est enrichi des réponses précédentes.
L'objectif est de mettre en évidence les consensus, mais aussi les divergences. Les consultants doivent expliciter et argumenter leur raisonnement augmentant le résultat en qualité et fiabilité.
La méthode des scénarios prospectifs
Michel Godet ancien titulaire de la chaire de prospective stratégique au CNAM, a conceptualisé la métaméthode des scénarios : “La méthode des scénarios vise à construire des représentations des futurs possibles, ainsi que les cheminements qui y conduisent. L’objectif de ces représentations est de mettre en évidence les tendances lourdes et germes de rupture de l’environnement général et concurrentiel de l’organisation.”
Les scénarios n’ont pas besoin d’être probables, mais ils doivent mettre en évidence des marges de manœuvre réalistes pour les acteurs qui désirent construire l’avenir qu’ils ont choisi.
Les innovations technologiques, les conflits, le climat… constituent des hypothèses disruptives contribuant à la conception des scénarios divergeant d’un scénario tendanciel, c’est-à-dire correspondant aux tendances actuelles.
La prospective décisionnelle fait intervenir la systémique puisqu’elle implique la comparaison, soit de solutions à efficiences identiques en faisant ressortir la moins chère, soit l’inverse.
Des récits concrets de l’avenir sont conçus en se basant autour des incertitudes principales qui modèlent la trame environnementale future.
Un scénario peu probable peut se révéler extrêmement productif en permettant de forcer l’imagination, de stimuler la discussion et d’attirer l’attention d’acteurs spécifiques. Souvent l’imagination et la faculté de représentation faisant défaut, l’approche scénaristique va permettre de concrétiser les futurs possibles. Ainsi les incertitudes, la complexité et les changements de paradigme peuvent être entièrement gérés. Les scénarios offrent une modélisation de situations complexes et virtuelles en les explicitant suffisamment pour, par exemple, des architectes d’entreprise, afin qu’ils puissent les analyser et mesurer les éventuels impacts sur les stratégies. Ces trames constituent de parfaits supports à la projection des acteurs dans un environnement volontairement impacté par d’importants changements. Pour que la représentation du futur soit incitative pour les experts à s’impliquer, il faut qu’elle soit plausible, cohérente et que le raisonnement inductif soit d’une grande rigueur.
Les scénarios tendanciels sont des scénarios de référence, ils envisagent l'évolution plausible, ils sont sans surprise. Ils correspondent à une poursuite des tendances actuelles, sans rupture majeure, et intègrent des facteurs de changements déjà connus dont la probabilité est certaine.
Partant de ces scénarios tendanciels, d'autres scénarios lui sont confrontés sur la base d'objectifs à atteindre et/ou de contraintes nouvelles prévisibles.
Les scénarios des futurs possibles d'après Vincent Enjalbert (https://lecercledesdeveloppeurs.files.wordpress.com)
Les scénarios prospectifs exploratoires partent d’une situation connue, initiale, pour explorer progressivement le futur. Les descriptions qui en sont faites, correspondent à des images très contrastées (scénario idéal, scénario catastrophique, scénario alternatif) et permettent d'étudier les processus d'évolution qui conduisent à l'une ou à l'autre de ces situations.
Ces scénarios contrastés sont donc destinés aux hypothèses de rupture, ayant ou non un degré de probabilité faible, mais dont l'impact est potentiellement important.
Exemple de modélisation de scénarios exploratoires de l'impact de l'évolution du climat sur le littoral (Alliance nationale de recherche pour l'environnement)
Les scénarios normatifs partent d'une norme de désirabilité (image souhaitable ou non). Le processus de modélisation est inverse aux scénarios exploratoires, puisqu’on remonte du futur vers le présent. Le cheminement est alors construit de façon rétrospective. Ils éclairent davantage les risques de ruptures et les moyens à mettre en œuvre pour parvenir à des objectifs prédéfinis (éviter telle situation ou atteindre telle autre).
Conclusion
Évidemment, la prospective ne consiste pas à regarder dans une boule de cristal, dans le but de deviner l'avenir, mais entend influer sur l’avenir, c’est une ouverture de l’entreprise vers l’extérieur. Une fois choisi le scénario le plus pertinent et plausible, elle oriente sur la dynamique à mettre en œuvre pour que son déroulement ait lieu.
Elle est source d’inspiration pour l’innovation dans la mesure où l’entreprise tente de s'approprier les changements du monde qui l’entoure : ruptures technologiques, nouvelles réglementations, crises, etc.
La prospective permet aux directions générales d’expliciter des domaines aux perspectives indéfinies et qui risqueraient de dégrader les processus métiers.
La résilience dépend de l’innovation et un bon moyen d’innover c’est encore de mettre en œuvre une démarche de prospective.
Mais attention, il ne faut pas oublier que l’avenir peut être très surprenant.
« Le pétrole est un liquide minéral dépourvu de toute utilité. De par sa nature, c’est un liquide gluant et nauséabond. Le pétrole ne peut être employé d’aucune façon, sauf à lubrifier les roues des charrettes indigènes. »
CONCLUSION DE L’ACADÉMIE DE SAINT-PETERSBOURG, après l’envoi d’une mission russe à Bakou en 1809.
|
Rhona Maxwel @rhona_helena |
“Regarder un atome le change, regarder un homme le transforme, regarder l’avenir le bouleverse.”
Gaston Berger
Compléments de lecture
- BMM Business Motivation Model, norme OMG, les idées clés pour mieux comprendre la stratégie d'entreprise
- BMM Business Motivation Model, norme OMG, les éléments de modélisation – vision, but, objectif, stratégie, tactique, ...
- Cours complet BMM Business Motivation Model norme OMG - les concepts de base – les moyens pour parvenir à ses fins
- Cours complet BMM Business Motivation Model norme OMG - les facteurs impactants et les évaluations de leurs influences
- Positionnement des processus et règles métiers dans la norme BMM Business Motivation Model de l’OMG et autres artefacts génériques
- Modélisation métier : méthode des processus métier orientés objectifs
- Le Machine Learning est il aux moteurs de règles métiers (BRMS) ce qu’une chute d’une météorite géante fut pour l’extinction des dinosaures ?
Et lorsqu'une contrainte oblige à ne pas respecter les règles d'urbanisme des SI, que se passe t'il ?
Les référencements, l'intégrations des nouvelles lois, les innovations des concurrents, la pression des clients ou des actionnaires amène à mettre en place des fonctionnalités rapidement au détriment de la conformité des règles d'urbanisme du SI.
Le projet doit financer la ( "quick and dirty" ) solution à court terme ainsi que la migration vers la situation cible.
Cette migration, qui n'est pas soumise aux mêmes contraintes de planning, a pour but de restaurer la capacité du système à être flexible.
De cette façon, le besoin d'être réactif est satisfait et la capacité à le rester est maintenue.
La rentabilité du projet ne peut être remise en cause par le financement de la situation cible, sinon on pourrait se poser la question si le projet est réellement rentable ?
Comment seront gérer les surcoûts dus aux difficultés de maintenance et d'évolution engendrés par cette solution non conforme ?
Rhona Maxwel
@rhona_helena
"Une idée fixe aboutit à la folie ou à l'héroïsme"
Victor Hugo
Articles conseillés :
Édicter des règles d'urbanisme du SI c'est bien, les faire appliquer c'est encore mieux.
Les règles d'urbanisme du SI : maîtriser les échanges inter-applications
Mais dans la vrai vie, qu'est ce qu'il y a dans les règles d'urbanisme du Système d'Information ?
Les règles de l'urbanisme du Système d'Information : encore une contrainte de technocrates ?
Quel est le budget de l'urbanisation et urbanisme du Système d'Information ?
Édicter des règles d'urbanisme du SI c'est bien, les faire appliquer c'est encore mieux.
Plus la mise en œuvre des règles se fait en amont et apporte des solutions aux projets, plus grande est l'efficacité .
Les règles concernant le management de l'urbanisation abordent les aspect organisation, formation, mesure de la progression dans l'urbanisation, insertion de l'urbanisme dans la gouvernance et fixent les instances légitimes pour étudier les aspects d'urbanisme.
On le sait, sans le contrôle, on risque que les règles ne soient pas appliquées, car bien souvent les chefs de projets les voient comme des contraintes et des coûts supplémentaires.
Voici quelques solutions pour faire appliquer les règles d'urbanisme de SI :
- formation des acteurs projets
- livrable spécifique d'urbanisme dans la méthodologie d'entreprise
- coaching des équipes
- participation des urbanistes aux phase cruciales des projets
- bilan de fin de phase
- utilisation comités spécifique
- audit projet
Toute la subtilité, consistera dans le positionnement du curseur entre les exigences et leurs contrôles, l'incitatif et le répressif, entre la règle et les exceptions.
Rhona Maxwel
@rhona_helena
"Un moment de patience peut préserver de grands malheurs, un moment d'impatience, détruire toute une vie."
Proverbe chinois
Articles conseillés :
Sur quels critères doivent reposer les indicateurs d'urbanisation d'un système d'information ?
Quel est le budget de l'urbanisation et urbanisme du Système d'Information ?
Les règles d'urbanisme du SI : maîtriser les échanges inter-applications
A l'intérieur d'un Système d'information, les échanges de données entre blocs fonctionnels n'appartenant pas au même domaine ne se font pas en point à point mais passent par l'intermédiaire du domaine fonctionnel « Zone d'échanges ».
Une solution consiste à mettre en place un bus logiciel ( ESB Enterprise Service Bus ).
Les enjeux majeurs de l'urbanisation des SI sont la flexibilité, l'évolutivité et la maintenabilité des SI.
Au niveau de l'architecture applicative, les blocs applicatifs issus de la cartographie applicative doivent communiquer entre eux par envoi de message traduit généralement dans un langage pivot c'est-à-dire le langage métier commun à tous les domaines de l'entreprise.
Une des règles de l'urbanisme des SI est qu'un bloc possède une interface offerte à l'extérieur pour qu'elle puisse communiquer avec lui.
Ces interfaces se traduisent bien souvent par des services. Les blocs applicatifs se branchent sur un intermédiateur bien souvent un bus logiciel (ESB Enterprise Service Bus et pas Encéphalopathie Spongiforme Bovine).
L'intérêt est multiple. Un seul adaptateur est requis pour connecter un bloc sur le bus et pouvoir communiquer avec les n-1 autres blocs au lieu des n x (n - 1)/2 liens si on devait les relier tous directement en point à point. Le gain est énorme sauf si cela coûte plus cher de développer un adaptateur spécifique que de mettre en place toutes les combinaisons de liens possibles.
Heureusement les ESB du marché (open source ou commerciaux) sont livrés avec tous les types d'adaptateurs sur étagère. Ils correspondent à tous les protocoles standards (HTTP, …) et permettent de faire des transformations faciles d'un modèle de données métier spécifique vers le langage métier pivot.
Les points d'attention concernent la scalabilité, la disponibilité et la redondance ainsi que les outils de monitoring (BAM Business Activity Monitoring), de diagnostique et de reprise sur erreur. Autre avantage, l'ESB permet de séparer complétement la partie logique de la partie technique. A charge de l'ESB de gérer les transformations des formats de données dans les 2 sens, l'acheminement, le routage, la sécurité, le reporting d'exploitation et les SLA (Service Level Agreement = contrat de service comme l'engagement sur les temps de réponse, …).
L'ESB peut être intégré avec un moteur de processus exécutable métier et un moteur de règle métier.
Le premier permet d'automatiser les enchaînement des activités humaines et informatisées et la réorchestration de ces activités de manière agile et flexible.
Le deuxième permet d'injecter des règles de routage dans le processus métier ainsi que des nouvelles règles métier liées à des évolutions du marché, de la concurrence ou légales.
Rhona Maxwel
@rhona_helena
"A ta naissance, tout le monde rit et tu es le seul à pleurer. Conduis ta vie de façon à ce qu'à ta mort tout le monde pleure et que tu sois le seul à sourire."
Confucius
Articles conseillés :
Urbanisation du Système d'Information : les points d'attention concernant les performances
Urbanisation du Système d'Information : les dangers des nouvelles technologies
Quels sont les axes de recherche et développement de l'urbanisation ?
Mais dans la vrai vie, qu'est ce qu'il y a dans les règles d'urbanisme du Système d'Information ?
Dans la démarche d'urbanisation, cela dépend de chaque organisation, les règles d'urbanisme d'un SI couvrent tout ou partie du spectre de l'urbanisation, certaines sont obligatoires et d'autres de simples recommandations.
Des règles portent sur la manière de définir les domaines fonctionnels. Elles prévoient de respecter les propriétés d'indépendance des blocs, de séparation entre domaines métier et domaine de support, …
D'autres règles d'urbanisme du SI traitent les cartographies :
- Quelles cartographies sont exigées ?
- Quelle granularité ?
- Quels outils doivent être utilisés ?
- Quels acteurs en sont responsables ?
- Quelles sont les fréquences des mises à jour ?
Ces règles s'appliquent aux principales cartographies :
- Cartographie fonctionnelle : elle décompose le périmètre de l'entreprise en domaines métiers. En principe cette cartographie évolue peu car elle reflète l'activité de l'entreprise et non son organisation . Cette cartographie est essentielle à l'urbanisme du SI car elle sert d'ossature à toute description et action sur le SI.
- Cartographie métier : elle décrit les étapes des processus métiers majeurs de l'entreprise et leurs principaux échanges. Le grain de description peut être variable. Certaines contraintes, par exemple d'ordre réglementaire, peuvent nécessiter une description fine des processus. Pour d'autres cas, un niveau plus agrégé est suffisant.
- Cartographie applicative : elle reporte de manière exhaustive les applications et leurs liens.
- Cartographie technique : elle reporte les infrastructure techniques qui supportent les applications (serveurs, réseaux, …).
Pour les projets, ces règles établissent le paysage dans lequel devront s'insérer leurs développements. Elles déterminent aussi les documentations qu'il faut mettre à jour pour actualiser ce paysage.
Pour chaque domaine métier, une cartographie des applications existe et est mise à jour par les projets.
Concernant la mise sous contrôle des référentiels, des règles d'urbanisme du SI doivent stipuler :
- La nécessité de se raccorder aux référentiels existants
- Dans quels cas il convient de créer un référentiel
- Les règles de gestion de ces référentiels
Un référentiel de données d'entreprise ne doit pas être géré dans une application spécifique opérationnelle. Dans le cas d'un ERP (Enterprise Ressource Planning), la gestion d'un référentiel au sein de l'ERP doit être murement réfléchi pour des raisons d'interopérabilité, des risques liés à un système propriétaire, …
Les règles d'urbanisme du SI pour la définition des cibles s'attachent à garantir l'existence de cibles métier et cibles d'urbanisme, sans interférer sur le contenu même de ces cibles. Des règles peuvent aussi prévoir les modalités de définition, de mise à jour et de validation des cibles fonctionnelles et techniques.
L'élaboration des cibles SI est l'occasion de lever la tête, afin de formuler les évolutions métiers sur le moyen/long terme et en déduire les adaptations du SI. La définition des cibles est le moyen d'améliorer l'efficacité dans la prise en compte des évolutions futures.
Par domaine métier, une cible fonctionnelle existe et est validée par le métier.
Les règles de construction de SI s'adressent aux projets. Elles vont leur garantir une bonne insertion dans le SI et une bonne capacité d'évolution. Par exemple :
- Obligation, pour un module, d'être dans un et un seul domaine métier
- Usage des référentiels
- Nécessité de distinguer ce qui outille les processus métiers, le décisionnel, la gestion des ressources, la sécurité, …
- Nécessité d'isoler les mécanismes d'échanges
- Règles d'architecture technique (technologie, composants, …)
Elles simplifient les projets, leur maintenance et leur appréhension par les acteurs SI
- La construction de tout nouveau système applicatif respecte un modèle en n couches
- Deux applications relatives à deux activités différentes ne peuvent pas gérer une même donnée en accès CRUD (Create, Read, Update, Delete)
- Une application métier utilise des services pour réaliser les fonctions : échanges, données référentielles, sécurité, décisionnel, gestion des ressources nécessaires au processus métier.
Rhona Maxwel
@rhona_helena
"Ayant médité la douceur et la compassion, j'ai oublié la différence entre moi et les autres."
Milarepa
Articles conseillés :
Les règles de l'urbanisme du Système d'Information : encore une contrainte de technocrates ?
Quel est le budget de l'urbanisation et urbanisme du Système d'Information ?
Sur quels critères doivent reposer les indicateurs d'urbanisation d'un système d'information ?
La méthode top-down dans l'urbanisme du Sytème d'Information
Les règles de l'urbanisme du Système d'Information : encore une contrainte de technocrates ?
Quand les règles d'urbanisme ont été définies dans une démarche strictement top-down, il est à craindre des situations de blocage dans la mise en œuvre.
Le besoin de disposer d'un ensemble de règles provient toujours de la nécessité d'introduire une cohérence dans la construction du SI :
-
pour définir un cadre normalisé de référence pour la gouvernance du Système d'Information.
-
pour homogénéiser, si nécessaires, les méthodes de développement, lorsqu'il y a plusieurs directions fonctionnelles.
-
dans le cadre de fusion de sociétés, pour définir les règles de construction des futurs systèmes communs.
-
pour pouvoir disposer d'un ensemble de règles standardisées.
C'est le besoin de cohérence et d'efficacité qui assurera lui-même le rôle moteur de l'urbanisation du SI.
Quand les règles d'urbanisme ont été définies dans une démarche strictement top-down, il est à craindre des situations de blocage dans la mise en œuvre.
L'adoption des règles est un mécanisme progressif et cumulatif.
Les principes sur lesquels sont fondés les règles d'urbanisme sont :
-
alignement sur les métiers
-
cohérence
-
modularité
-
subsidiarité
-
progressivité
Les règles d'urbanisme vont formuler ce qui exigé et ce qui est interdit, mais trop de contraintes n'est jamais bon et il faudra laisser suffisamment de souplesse aux chefs de projet.
Rhona Maxwel
@rhona_helena
"Nul ne sait ce qu'il peut faire avant d'avoir essayé".
Publilius Syrus
Articles conseillés :
Quel est le budget de l'urbanisation et urbanisme du Système d'Information ?
Sur quels critères doivent reposer les indicateurs d'urbanisation d'un système d'information ?
La méthode top-down dans l'urbanisme du Sytème d'Information
Quel est le budget de l'urbanisation et urbanisme du Système d'Information ?
Le niveau d'investissement en urbanisme peut se mesure par un indicateur simple.
L'urbanisme se développe par cycles.
L'investissement dans une nouvelle infrastructure d'urbanisme est obligatoire lorsqu'il y a des dysfonctionnements, des surcoûts, des blocages ou des constats de déphasage par rapport à la stratégie.
La mise en place de cette infrastructure est progressive, car l'urbanisme ne crée pas de rupture.
Des investissements pour la création ou le développement d'un service d'urbanistes et les réalisations techniques sont nécessaires.
L'étape suivante est la mise en œuvre de l'urbanisme dans les projets IT, véritable consolidation de la nouvelle politique d'urbanisme.
Cette infrastructure est conçue pour une durée de vie longue, plus longue que celle des systèmes d'information qui la prennent pour base.
Un jour, il faudra la remettre en cause, pour faire face aux enjeux futurs.
Une nouvelle période d'investissement sera engagée, modifiant tout ou partie des bases précédentes.
Ces cycles, générations successives de politiques d'urbanisme, sont des avancées dans la maîtrise des SI.
L'urbanisme gagne en maturité :
-
1ère étape, on se limite à cartographier le patrimoine d'un SI mal connu. Ceci permet d'éviter l'empilement systématique des composants applicatifs issus de projets opportunistes. L'urbanisme est préventif, limite la complexité, les redondances et incohérences.
-
2ème étape, l'urbanisme, ayant gagné en crédibilité auprès des maîtres d'œuvre, peut engager la promotion des référentiels.
-
3ème étape de maturité, l'urbanisme espère à la mise en ordre des processus, et à un meilleur alignement stratégique.
Les efforts budgétaires dans l'urbanisme suivent des fluctuations périodiques :
-
Instabilité incitant à privilégier le simple et jetable
-
Nécessité d'aller au plus vite pour gagner des parts de marché en phase de croissance extensive
-
Période de consolidation
-
Année de restrictions financières
La difficulté analytique existe car la fonction urbanisme n'a pas un périmètre immuable :
-
D'une entreprise à l'autre, il existe des variantes dans les définitions (urbaniste, architecte fonctionnel, architecte d'entreprise), dans l'organisation, dans les rôles des processus de l'urbanisme.
-
Au sein des grands groupes, des variantes existent aussi entre les diverses entités, leur organisation, et la subsidiarité ajoute un niveau de complexité pour une comptabilité analytique.
-
Les entreprises ne mettent pas en œuvre tous les processus de l'urbanisme, cela dépend du contexte et du schéma de gouvernance.
Un indice de maturité basé sur une échelle unique serait réducteur, car l'objectif n'est pas d'appliquer tous les processus.
Au cas par cas, l'entreprise arbitre et choisit le panier de processus pertinents.
L'indice d'urbanisation restitue mieux cette approche multiple, et ne livre aucune préconisation.
Le niveau d'investissement en urbanisme peut se mesurer par un indicateur simple : le rapport entre cet investissement et celui constaté dans les projets de Systèmes d'Information.
L'urbanisme ayant une nature d'infrastructure pour les Systèmes d'Information, le dénominateur est constitué uniquement du coût d'étude, de développement, de test, à l'exclusion des coûts de maintenance, et de ceux de maîtrise d'ouvrage. Il s'agit de comparer des coûts d'investissement de même nature.
L'effet de levier de l'urbanisme porte sur la création de valeur.
Par son action vertueuse sur la flexibilité, la réactivité, il contribue alors directement à la stratégie.
L'urbanisme révèle et positionne certains composants du SI et objective les scénarios répondant aux aléas et stratégies du métier.
Si tel est le cas, un ratio d'urbanisme durablement faible, une fonction sous-configurée et incapable de répondre, en qualité, aux enjeux, pourra mettre en péril l'entreprise, bien au-delà de la performance des processus.
Rhona Maxwel
@rhona_helena
« Le courage est la première des qualités humaines car elle garantit toutes les autres. »
Aristote
Articles conseillés :
En Urbanisation SI, les constructions/destructions et l’entretien du POS sont réglementés
Urbanisme SI : les objectifs en moins de 20 lignes !
Urbanisation du Système d'Information : Ne vous perdez pas dans les typologies de référentiel !
Urbanisation du Système d'Information : créez l'évènement !
Dans le futur, il faudra réaliser la symbiose des méthodes et veiller à la cohérence des gouvernances SI et processus
L'avenir de l'urbanisme de SI sera lié à 3 facteurs :
- La généralisation des relations en entreprise étendue, au delà des périmètres figés de la firme traditionnelle.
- La montée inéluctable des organisations autour des processus, du management par les processus, qui remettra en cause les fonctionnements internes, et sera reliée aux SI urbanisés.
- L'extension progressive des solutions techniques et conceptuelles basées sur des architectures de services pour les fonctions métiers souvent développées par les informaticiens de l'entreprise, comme pour les fonctions de support traditionnellement confiées à des ERP.
Le 1ère évolution, les relations entre les acteurs économiques, de plus en plus basées sur la technologie, gommeront les espaces traditionnels.
Les entreprises interagiront plus fortement, dans des processus plus directs et plus tendus avec leurs clients et leurs partenaires.
Ce fonctionnement en entreprise étendue qui existe déjà chez de nombreux grands comptes, deviendra la règle.
Dés lors, le champ des préoccupations d'urbanisme débordant le monde clos de l'entreprise, il faudra raisonner sur l'entreprise et son écosystème.
Les flux, la gestion des grands référentiels, l'activation de services automatisés, de bases de connaissances, seront à situer dans un contexte élargi, où les mouvements stratégiques, partenariats, fusions, filialisations, acquisitions, externalisations, pourront redistribuer les cartes autour des composants urbanisés.
Les urbanistes devenant architecte de la chaîne de valeur, auront à étendre leurs investigations jusqu'aux limites de ces champs d'action.
La 2ème évolution, elle aussi déjà engagée, concerne la vision processus. en effet la recherche de l'efficience, de la flexibilité et la proposition pour le client de la plus grande efficacité, continueront à bousculer les organisations.
La déformation des entreprises organisées en silos, en des modèles orientés processus deviendra une généralité.
Il faudra se préoccuper de diffuser la culture du management par les processus, de faire passer le BPM dans la réalité : instituer des propriétaires de processus, gouverner l'amélioration et piloter les performances pour que les processus répondent aux services qu'attendent les multiples parties prenantes, clients, usagers, partenaires, employés, actionnaires, sociétaires, ...
L'urbanisme des SI incite à décrire les processus métiers.
C'est un début, mais les processus sont considérés comme une entrée, et l'urbaniste n'a pas de légitimité pour les optimiser, voire les remettre en cause.
Pourtant dans le futur, il faudra fédérer les approches par les SI et celles par les processus, connecter les différentes visions transversales, réaliser la symbiose des méthodes, veiller à la cohérence des gouvernances SI et processus : les urbanistes seront les catalyseurs de cohérence, de transversalité, et de flexibilité.
La 3ème évolution majeure se réfère à la sphère technique.
Urbaniser le métier ou architecturer l'entreprise, tire les urbanistes vers le haut, que leur référence s'appelle urbanisme des SI, EA (Enterprise Architecture ou Architecture d'Entreprise) ou BPM (Business Process Management ou Gestion des Processus Métiers).
Ils ne doivent pas ignorer les évolutions techniques.
Un miracle technologique se produira-t-il (attention aux effets de buzz) ? Une révolution technique donnera-t-elle l'agilité instantanée tant espérée ?
Comme le montre notre X-Men John Zachman dans son modèle, pour l'instant aucune bonne fée n'est apparue avec sa baguette magique, il sera toujours nécessaire d'architecturer l'entreprise.
Les grandes entreprises dotées de SI de plus en plus complexes, seront confrontées à un environnement réglementaire multiple, protéiforme, à des contraintes de marché archi-mondialisées.
Il leur faudra lutter férocement contre l'entropie et rechercher toujours plus d'agilité.
Dans le futur, tel un funambule, l'urbaniste devra maintenir l'équilibre sur une corde qui sera disposée malheureusement de plus en plus haut.
Rhona Maxwel
@rhona_helena
"Le malheur déteint sur nous et nous ravit notre force. Mais il faut trouver le courage d'agir."
Laurent Seksik